Au-delà de la lumière, Daniel Mat – Édition Scrineo

Dans le futur, la réalité virtuelle a fait place aux rêves lucides partagés. Une version extrême de cette technologie, basée sur des expériences de mort imminente contrôlées, a donné naissance à la métamachie : un sport de combat opposant deux compétiteurs dans des arènes subconscientes, armés de leurs souvenirs manipulables à volonté.

À dix-sept ans, David redoute cette discipline dont l’étoile montante n’est autre que Théa, sa petite amie. Plus sa carrière progresse, plus elle s’éloigne de lui. Tout bascule le jour où elle ne se réveille pas à la fin d’un combat. Alors que l’organisation étouffe l’affaire, David se retrouve seul et sans réponses.

Lorsque l’opportunité de participer à un tournoi amateur s’offre à lui, il y voit une chance de mener l’enquête de l’intérieur. Mais ses propres souvenirs semblent se mettre en travers de son chemin.

Jusqu’où est-il prêt à aller pour découvrir la vérité ?

 

Au-delà de la lumière est le premier roman de Daniel Mat, publié aux éditions Scrineo en 2019. Quant à l’auteur lui-même, nous savons juste qu’il a été enseignant de formation… Rien n’aurait été confirmé sur les différentes casquettes qu’il a pu porter ensuite.

Entrons maintenant dans le vif du sujet. Je ne sais pas pour vous, mais le résumé m’a un peu perdue quand je l’ai découvert… tout en allumant mon intérêt. Un tournoi ? Des combats virtuels ? Une arène qui puise son apparence dans les souvenirs des duellistes, et qui peut ainsi être remodelée à leur gré ? Qu’on se le dise, c’est une idée plutôt peu banale !

Grâce au tournoi qui sert de cadre à l’intrigue, Daniel Mat l’exploite à fond dans des scènes d’action toutes plus variées les unes que les autres. Malgré le nombre d’hommes et de femmes à abattre pour empocher la victoire, je n’ai jamais eu une impression de redondance et attendais même chaque combat avec une certaine impatience. Ce qui est tout aussi plaisant, c’est de voir la maîtrise et l’assurance que gagne David, notre héros, duel après duel. Non seulement c’est cohérent, mais ça apporte un intérêt d’autant plus fort à chacun de ses combats. Pour autant (il faut toujours qu’il y ait un mais, c’est la dure loi de la vie), j’ai trouvé que l’issue des affrontements était souvent assez prévisible. Est-ce vraiment un bémol pour autant ? Non, parce que c’est l’histoire qui veut ça. Quel serait l’intérêt d’un livre où le héros est mis sur le banc de touche dès le premier duel ?

Mais n’allez pas croire pour autant que le livre n’est centré que sur des combats de métamachie. L’intrigue va bien au-delà du tournoi qui opposent David et ses sept autres concurrents et concurrentes ; en fait, on pourrait même dire que la métamachie ne lui sert à la fois que de cadre et de tremplin. C’est par cette discipline que notre héros va essayer de comprendre ce qui est arrivé à sa petite amie après un combat qui s’est terminé si tragiquement pour elle – elle a beau être vivante, son âme semble avoir quitté son corps. Il ne va pas que combattre, mais aussi exploiter les possibilités offertes par ce monde virtuel pour progresser dans son enquête. Idem dans le monde réel où il saisira toutes les occasions possibles pour attraper le moindre petit bout de vérité. Vous l’aurez compris, David est quelqu’un de très déterminé et qui n’hésite pas à braver sa propre sécurité tellement sa quête l’obsède (je crois que le terme n’est vraiment pas exagéré : on sent bien à chaque page que Théa est le moteur de son existence et ce qui compte le plus à ses yeux).

Ceci étant dit, il m’a semblé parfois un peu trop… passif. Les autres concurrents ne sont pas tous des plus amicaux, et surtout au début de la compétition. Leur animosité à son encontre (plus ou moins justifiée) le transforme parfois en véritable punching-ball humain dans le sens où les critiques ne cessent de pleuvoir sur lui. Le problème, c’est qu’il ne sait pas ou ne parvient pas toujours à se défendre : il faut bien le dire, c’est assez frustrant. Autre chose que vous vous demandez peut-être : si ses rivaux sont aussi peu sympathiques, est-ce que ça suffit à les rendre tous antipathiques ? Eh bien non. Vu leur nombre (sans parler des autres personnages secondaires), j’ai trouvé que Daniel Mat a approfondi leur personnalité au maximum de ce qu’il était possible de faire. Chacun a sa propre histoire, des motivations qui justifient leur présence dans le tournoi. C’est valable même pour le pire d’entre eux : connaître leur passé amène la compréhension et donc, dans la plupart des cas (il y a toujours des exceptions), c’est assez difficile de les détester franchement. Sans parler d’autres qui passent du statut de « rivaux » à celui « d’amis »… Bref, les sept concurrents de David et les autres personnages ne sont pas monolithiques et ont tous quelque chose à raconter, même si ça ne vous plaira pas forcément.

En effet, l’histoire est somme toute assez sombre. Qu’il s’agisse du sort de Théa, du passé de certains personnages, de l’histoire de David ou encore des difficultés auxquels il se trouvera confronté, on ne peut pas dire que l’on a matière à se taper des fous rires au cours de notre lecture. La plume de l’auteur est d’ailleurs raccord avec cette ambiance : simple mais efficace, et surtout dénuée de cette touche de légèreté qui me plaît habituellement – ce qui pour autant n’enlève rien à la fluidité du style. Inutile de dire que le dénouement est lui-même conforme à ce que l’on peut s’attendre : oui, il était peut-être un peu trop dur pour mon petit cœur sensible, mais il est aussi parfaitement juste et je n’aurais pas souhaité que l’auteur invente autre chose.

Terminons avec un point que je n’ai pas encore abordé : l’univers d’une manière générale. Là où la métamachie est suffisamment développée pour que l’on puisse tenir une conférence de deux heures à ce sujet, le cadre plus global où se place l’histoire est un peu plus flou sans que ça ne soit dérangeant. On comprend surtout que le monde a traversé une grave crise et essaye de s’en remettre tant bien que mal ; à mon sens, c’est suffisant dans le sens où plus de détails aurait alourdi l’intrigue. J’ai aussi eu l’impression que l’auteur souhaitait aborder d’autres sujets sans aller au fond des choses : par exemple, le thème du vieillissement et de l’immortalité m’a semblé manquer un peu de consistance au regard de l’importance qui semblait lui être donné. De même, la manière dont il aborde les inégalités sociales qui apparaissent de manière flagrante à plusieurs reprises dans le récit manque un peu d’originalité même, si d’un autre côté, ça permet peut-être de faire plus facilement des liens avec notre société actuelle.

En résumé, Au-delà de la lumière m’est apparu comme un livre complet et satisfaisant à tous points de vue. L’intrigue a beau ne pas être très joyeuse, elle sait retenir notre attention et d’autant plus que l’auteur utilise intelligemment le thème fort du roman (la métamachie) pour en déployer tout le potentiel. Le tout est servi par des personnages aux personnalités variées et aux histoires travaillées, au premier rang desquels figure David et sa détermination à toute épreuve. Ce fut donc une très bonne lecture que je ne peux que vous recommander, que vous soyez amateur d’action et de scènes de baston époustouflantes ou, plus prosaïquement, d’une histoire qui sort des sentiers battus.

 

Bénédicte Durand

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