L’île des Porte-Chance de Lucie Heiligenstein – Éditions Scrineo

L’île des Porte-Chance est le premier roman de Lucie Heiligenstein. En voici le résumé :

Sur l’île d’Aube Grise méridionale, il ne fait jamais tout à fait jour mais jamais tout à fait nuit non plus. C’est là que vit Lou Esperandieu, fils adoptif d’Émérance, une Porte-Chance professionnelle qui met son don au service du gouvernement, lui apportant ainsi la bonne fortune pour ses projets.

Mais depuis quelque temps, de nombreux habitants des Terres Obscures arrivent sur les plages de l’île, au grand dam de certains locaux. Que se passe-t-il vraiment en Fin de Nuit, pays aux confins de ce continent sans lumière, qui pousse sa population à s’enfuir ?

Alors que Lou découvre son don de Porte-Chance, Émérance décide de l’envoyer au Midi pour fuir l’agitation qui règne sur l’île. Elle ne se doute pas que d’autres dangers le guettent dans son périple, et qu’elle-même va bientôt devoir faire face aux ombres de son passé, et à ce qui se cache réellement dans les Terres Obscures…

C’est le début d’un long voyage pour Lou, fait de rencontres exceptionnelles et de dangers ; un voyage qui va le changer à jamais…

 

Faire de la lumière le socle fondateur de son univers, c’est une idée pour le moins lumineuse. Lucie Heiligenstein parvient sans peine à restituer les caractéristiques de chaque partie du monde : en effet, les coutumes, l’architecture des villes et jusqu’à l’apparence des habitants varient selon la luminosité dont leur pays bénéficie. Là où les maisons sont colorées et où la vérité occupent une place prépondérante dans le Midi, les lampadaires sont légion dans la Fin de Nuit et la réalité est une notion plus fluctuante.

Cerise sur le gâteau, la quête initiatique de Lou va l’amener à voyager dans le monde entier ; chaque partie du roman, qui portent le nom de chacune des régions du monde, est donc prétexte à découvrir une nouvelle civilisation et de nouveaux compagnons d’infortune (ou de nouveaux antagonistes). L’un d’entre eux en particulier va occuper une place aussi cruciale qu’ambigüe dans son périple et change un peu de ce que l’on a l’habitude de voir en littérature : comme son nom le laisse entendre – Jessie –, iel ne s’identifie ni comme un homme ni comme une femme, une particularité qui sera exploitée tout au long de l’intrigue et aura même son importance à certains moments.

D’une manière plus générale, les personnages sont marqués par leur grande diversité qui vont bien au-delà des secrets qu’ils tentent de garder pour eux (Émerance, la mère de Lou, largement en tête). Non contente de placer un certain nombre de personnages féminins à des postes de pouvoir, l’autrice accorde également à la problématique de la xénophobie une place prépondérante dans son intrigue, puisqu’elle est le point de départ des nombreux troubles qui vont s’ensuivre.

 

N'oublions pas non plus un autre élément fondamental du livre, le talent que Lou et sa mère possèdent : celui de pouvoir utiliser la chance et de l’accorder à autrui en suivant un rituel bien particulier. C’est en fait une malédiction autant qu’un don et Lucie Heiligenstein s’attache tout au long de l’intrigue à montrer que les conséquences sont toujours bien moins positives qu’on ne pourrait le croire de prime abord – ou en tout cas, elles ne le sont pas pour tout le monde.

En résumé, l’île des Porte-Chance est un one shot complet, avec un univers maîtrisé qui met en avant des notions assez originales : la lumière et la chance, ou encore la xénophobie et ses conséquences dans un autre ordre d’idée. La quête initiatique de Lou va lui permettre de percer les mystères du monde qu’il parcourt de long en large tout au long de l’intrigue, mais aussi d’en apprendre davantage sur sa famille et ses origines. Le dénouement peut éventuellement paraître un peu rapide mais n’en reste pas moins satisfaisant. Une aventure à dévorer sous le soleil de Midi ou en Fin de Nuit, armé d’une lampe de poche et pelotonné sous une couverture !

 

Bénédicte Durand

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