Il s’avère que je suis un immense fan de R.E.Howard dont je possède l’intégrale de tout ce qu’a publié Bragelonne en omnibus et d’autres choses encore. Que Conan est un héros de fantasy que j’apprécie au plus haut point et que j’ai tout lu ce qu’il y avait à en lire – y compris les pastiches (de Lin Carter à Terry Pratchett) que j’en ai lu énormément de Comics (de Barry Smith à Buscema) et même vu les adaptations cinématographiques plus ou moins réussies.
La présentation que l’on m’a fait de « La sonde et la taille » ainsi que le quatrième de couverture ne m’ont pas incité à vouloir me plonger dans le roman.
Je jette un œil sur la couverture et note la superbe illustration de Didier Graffet que j’adore ! Et qui je m’en rendrai compte quelques jours plus tard n’a STRICTEMENT RIEN À VOIR avec le roman…
Puis me demandant qui avait osé s’attaquer à ce monument de la littérature de fantasy, je lis Laurent Mantese.
Le Laurent Mantese de Malpertuis ? Et oui, il faut savoir compter sur les deux compères de génie que sont Christophe Thill et Thomas Bauduret pour nous trouver des auteurs sortis d’on ne sait où ayant d’immenses qualités d’originalité et d’écriture.
J’avais lu des nouvelles de ce Mantese qui m’avaient frappé sa maitrise de l’écriture et du déroulé scénaristique.
Bon, du coup j’ouvrais le machin.
Soyons clair : le résumé du scénario peut sembler court MAIS tout comme « Le Bâtard de Kosigan » de l’immense Fabien Cerruti, il n’y a pas besoin de plus quand on a l’art et la manière.
Je vous le pitche :
Conan a dépassé les 80 balais, il a un kyste infecté à un endroit mal placé – qui a vécu par l’épée… -, est roi d’Aquilonie depuis 40 ans et tout a l’air de bien se passer dans les sept royaumes qu’il contrôle d’une main d’acier dans un gant de satin. Il a avec lui son fils adoptif gentil mais profondément débile et est entouré de ses fidèles à peine plus jeunes que lui. Conan se trouve comme tous les ans aux confins de son royaume dans un château un peu pourave pour la grande réunion diplomatique des sept royaumes. Bien entendu les rois, barons et autres têtes de comtes soutenus par une religion naissante, se sont bien rendu compte que le lion perd sa crinière et qu’il serait peut-être temps de reprendre guerres, pillages et autres libérales joyeusetés. Pour se faire, entamer une coalition afin de recruter le bad boy « Tranche-Gueule » le bien nommé et sa bande d’écorcheurs qui auront pour mission de s’amuser dans le château et ramener la tête de Conan aux conspirateurs bien-nés.
Conan parvient à s’enfuir mais le « Tranche-gueule » et douze de ses compétents sbires partent à sa poursuite dans les confins de la Cimmérie. Histoire de corser le parcours, il semblerait que « quelque-chose » traque les traqueurs. Ils arrivent enfin à choper mon barbare préféré non sans mal, grâce au fils adoptif, qui je le rappelle n’est pas complètement rempli. Tout va bien pour ce qu’il reste de la joyeuse équipe de mercenaires quand soudain…
Oui, je sais, ça semble court mais c’est sans compter les talents de Laurent Mantese.
Et il y en a une patouillée !
L’écriture déjà. Elle est précise, châtiée par moment, totalement déjantée à d’autres, par exemple quand les mercenaires s’expriment. Le vocabulaire est d’une richesse exceptionnelle, tant au niveau architectural que pour les armes ou vêtements.
Les descriptions sont extrêmement réalistes frisant… se plongeant dans le trash de manière tout à fait logique.
Les personnages sont superbes, les nobles puent la trouille et la perfidie quand les mercenaires font simplement le taf, violant tuant, torturant avec une joie sans partage et leur chef « Tranche-Gueule » malgré les horreurs auxquelles il se livre exsude une certaine noblesse. Les douze sbires qui vont poursuivre Conan resteront gravés dans ma mémoire.
Et Conan, je vous l’assure, c’est bien lui. Diminué par l’âge et son infection mais c’est lui, l’homme fier et pragmatique, rusé et humain.
Les fans du héros ne devraient en aucun cas rater cet opus.
La comparaison de Mantese à Cormac McCarthy, évoqué sur le quatrième de couverture est effectif.
Je ne peux qu’espérer que Laurent Mantese s’amuse encore avec ce héros.
Jean-Hugues Villacampa