Claire Garand nous propulse dans une station spatiale où vivent dix petites filles qui sont chacune dans une station qui leur est propre, en orbite autour de la lune, la Terre étant morte.
Toutes ces petites filles ont été choisies pour accomplir une grande mission. Elles ont été sélectionnées pour leur intelligence, selon l’échelle de Breuil-Rostocka. Elles sont toutes des 4,5 ou 4,6. Toutes sauf une, la narratrice de l’histoire, a un rang bien moins élevé puisque c’est une 4,2. Elle subit donc de nombreuses brimades qui la poussent dans ses retranchements. C’est ce qui la mène à réaliser un défi pour prouver sa valeur, et par conséquent, à la découverte de la vérité sur ce qu’on attend d’elles : être des mères de l’humanité.
En effet, la société, dans laquelle évoluent ces petites filles, souhaite repeupler l’humanité. Pour ce faire, il faut des mères et ce sont ces dix petites filles qui devront enfanter l’humanité. Elles sont donc toutes prédestinées à tenir ce rôle, et ce, au détriment de leurs souhaits, de leurs envies, de leurs projets… En somme, de leur vie.
La narratrice va alors se révolter contre ce système qui veut la forcer à enfanter. Son caractère va la mener à tenter un nombre incalculable d’actions pour contrer ce destin ; car intelligente ou non, elle sait ce qu’elle veut et ne va pas en démordre, ce qui prouve une certaine intelligence d’ailleurs. Elle démontre une hargne de vivre inébranlable pour réaliser ses rêves, et tout particulièrement explorer l’univers.
Claire Garand construit un personnage d’une extrême force, d’une volonté de fer et d’une combativité exemplaire. Elle souligne avec justesse la ténacité dont nous devons faire preuve quand on va à contre-courant des idées d’une société.
C’est un roman de révolte sociale où tout part de cette question intime de la maternité où la narratrice n’aura de cesse de se battre pour ses droits, pour ses choix, son libre-arbitre.
Elle soulève un bon nombre de problématiques encore actuelles malheureusement, le droit d’avorter, le droit de disposer de son corps et de sa vie.
Claire Garand signe donc un excellent roman de science-fiction tant par la forme que le fond. Sa plume nous emporte totalement dès les premières lignes et le récit initiatique de cette petite fille finit de nous convaincre pour que l'on plonge complètement dans cette station spatiale, sans repères, à ceci près que les liens avec notre société sont pourtant bel et bien réels.
Claire Garand est nouvelliste et autrice plutôt de romans jeunesse, elle a publié un roman de fantasy urbaine Young Adult, Les Maîtres de la lumière (Éditions Rroyzz) qui a reçu le prix de la Cour de l’Imaginaire 2019 et une série numérique horrifique, Extinction Party, chez Doors.
Paideia est donc son premier roman adulte. Je vous invite à découvrir sa plume aussi fluide que percutante. C’est une autrice que je ne manquerai pas de suivre.
Karine BOITEL