Un petit résumé pour commencer : La légende prétend qu’il existait un monde merveilleux, un lieu magique où humains et créatures surnaturelles vivaient en paix. Un clan de puissantes sorcières aux yeux d’or y maintenait l’équilibre, jusqu’à ce qu’un mage au cœur aussi sombre que l’obsidienne le décime lors d’une nuit sanglante. L’harmonie rompue, le monde bascula dans le chaos. Le mal y règne désormais en maître, obligeant les êtres magiques à se cacher et les humains à se battre pour leur survie. Mais l’espoir revient lorsque l’Oracle prédit le retour des sorcières aux yeux d’or, car l’une d’elles a survécu au massacre. Une jeune fille prénommée Elena.
Il s’agit par ailleurs du premier roman de l’autrice, Lily Davinni, dont les grands maîtres sont notamment J.R.R Tolkien, J.K. Rowling ou encore C.S Lewis. Vous l’aurez compris, La dernière sorcière aux yeux d’or est un livre de Fantasy. Et plus précisément encore, le premier tome d’une duologie.
Ça faisait un petit moment que je n’avais pas lu de roman de high fantasy, pour la simple et bonne raison que j’avais fini par me lasser. C’est comme si vous mangiez des pizzas à tous les repas : vous adorez ça, mais un moment, vous finissez par en avoir un peu marre de retrouver toujours les mêmes saveurs.
Malheureusement pour moi, La dernière sorcière aux yeux d’or ne m’a pas réconciliée avec les pizzas la high fantasy. Les clichés y sont nombreux, en particulier dans les cent premières pages : pour ne vous citer qu’un petit échantillon, nous avons affaire dans ce roman à une paysanne qui est en fait la dernière survivante d’un clan de sorcières très puissant, qui possède de surcroît des pouvoirs d’une puissance inégalée (enfin, dans la théorie), et qui pour couronner le tout doit partir sauver son monde d’origine de la tyrannie d’un sorcier maléfique. Les autres informations que je ne veux pas spoiler sont un peu du même acabit, dans le genre « rien de nouveau sous le soleil ». J’ai même eu des flashs d’autres œuvres de fiction très célèbres au cours de ma lecture. Est-ce un mal pour autant ? Oui et non. Disons que ça limite les surprises, d’autant que l’intrigue est plutôt linéaire et qu’un certain nombre de facilités scénaristiques parsèment le récit. Gardons toutefois à l’esprit qu’il s’agit d’un premier roman. Pondre un chef-d’œuvre du premier coup n’est pas à la portée du premier venu, très loin de là.
Attardons-nous maintenant sur l’intrigue que je viens juste de qualifier de linéaire. Là encore, je n’ai jamais été vraiment surprise. Il y a suffisamment d’action pour que l’on ne s’ennuie pas mais j’ai tout de même eu l’impression de faire du surplace pendant une bonne partie du bouquin (ce qui est d’autant plus paradoxal que nos héros bougent beaucoup). Elena a un objectif clairement défini mais est encore loin d’essayer de le remplir… du moins, pas avant le dernier quart du livre. C’est seulement à ce moment que le titre du tome trouve sa pleine justification. C’est aussi à partir de là que les choses commencent à bouger sérieusement, et en particulier dans les dernières pages où tout est fait pour nous donner envie de lire la suite (enfin, surtout la fin du dernier chapitre… L’épilogue, quant à lui, m’a semblé un peu inutile).
Mais l’intrigue ne s’arrête pas là. Comme c’était à prévoir, nous avons droit à une romance… ou, devrais-je, à L’INÉVITABLE romance. Je vous préviens tout de suite : je suis très exigeante en matière d’histoires d’amour, mon avis est donc à prendre avec des pincettes. En un mot comme en cent : j’ai tout simplement détesté la romance qui nous est proposé ici, et d’autant plus qu’elle prend le pas sur l’intrigue principale à plusieurs reprises. Oui, je sais, c’est très violent dit comme ça, mais ç’a vraiment été mon ressenti. Il n’y a rien qui m’horripile davantage que ces espèces de relations où haine et amour s’entremêlent au point que l’on ne comprend plus rien. Quasiment tous les échanges entre Elena et son Roméo m’ont fait lever les yeux au ciel. Pourquoi diable surréagissent-ils autant ? Et comment peuvent-ils tomber amoureux l’un de l’autre aussi rapidement ? Et pourquoi rendent-ils tout aussi compliqué ? Et pourquoi… Bref, je ne suis vraiment pas le bon public, mais je ne doute pas que nombre d’entre vous y trouveront leur compte : apparemment, ce genre de romance est plutôt en vogue ces dernières années.
Et puisque je parle d’Elena et d’Even, autant vous dire maintenant qu’ils n’ont pas su me toucher non plus. Even parce que j’ai toujours eu du mal avec les beaux gosses possessifs et dont la plus grande passion est de souffler le froid et le chaud, et Elena parce que je n’ai pas réussi à m’identifier à elle. Un coup bravache et têtue (parfois un peu trop), un coup toute larmoyante et pleine de doutes… Elle était trop inconstante et ses réactions trop imprévisibles pour que je m’attache à elle. Pour autant, j’ai plutôt apprécié le fait qu’elle n’accepte pas facilement le rôle qu’on la force à jouer. C’est assez cohérent et ça change un peu de ce que l’on peut voir ailleurs. J’ai aussi été sensible à la relation entre Elena et la Recousue qui m’a plu sans doute parce qu’elle était moins chaotique et plus douce que ce à quoi nous habituent Elena et Even. Les autres personnages sont également assez attachants dans l’ensemble même si j’aurais apprécié qu’ils soient moins mis en retrait pour certains – je pense notamment à Alyr et Galdor, les compagnons d’Even.
Avant de mettre un point final à cette chronique, il me reste un dernier élément à développer : la plume de l’autrice. Elle a fait le choix d’adopter un vocabulaire plutôt soutenu, ce qui est tout à son honneur puisque cela rend son style assez riche. On pourrait craindre cependant que ça n’enlève à la fluidité du récit mais non, le livre se lit tout seul. J’ai juste noté quelques maladresses et répétitions… Rien de trop méchant pour autant. En fait, ce qui m’a le plus dérangée, c’est sans doute le manque de descriptions à certains moments de l’histoire. Même si le paysage n’est pas forcément remarquable, par exemple, j’aurais apprécié qu’on le signale lors du périple de nos héros. Là, c’était un peu trop flou et ça manquait un peu trop de vie pour que je me sente pleinement immergée. Je pourrais faire le même commentaire en ce qui concerne l’univers imaginé par l’autrice et qui m’a semblé souffrir de quelques imprécisions : j’aurais aimé comprendre un peu mieux comment s’organise la Terre (? Je n’ai pas vraiment compris si c’est bien là où Elena a vécu), si elle ressemble à notre Terre à nous et si oui, à quelle époque précisément. J’aurais également adoré en savoir plus sur Alatar, ce fameux monde supposément en danger. Ce qui m’a gênée en particulier, c’est le fait que je n’ai pas vraiment ressenti de menace au cours de ma lecture. C’est à peine si la présence du mage maléfique se fait ressentir, sauf à la fin éventuellement… Peut-être que ce défaut est corrigé lors du seconde tome ?
Il est maintenant temps de conclure (enfin). Vous l’aurez remarqué, j’ai soulevé pas mal de points qui m’ont déplu : la romance à l’opposé de mes goûts, l’intrigue un peu trop convenue, Elena pas vraiment très attachante comme antihéroïne, l’univers qui manque de consistance… Est-ce que ce fut une mauvaise lecture pour autant ? Je ne pense pas. Je le redis encore, mais il s’agit d’un premier roman. Les clichés ont beau être nombreux, on sent bien que l’autrice a essayé de se les réapproprier pour créer quelque chose de personnel et d’unique en un sens – je pense aux fameuses sorcières aux yeux d’or, qui sont une idée vraiment très originale. Il s’agit donc d’un livre avec beaucoup de potentiel, un potentiel qui ne m’a pas semblé exploité au maximum… mais peut-être que le deuxième tome réussit à corriger tous ces défauts ?
Bénédicte Durand