Voulant optimiser un week-end jeux sur Paris, je garnis mon sac des dits jeux et d’un livre prélevé sur ma PAL. Le choix fut vite fait : conquis par ma première approche de la collection Bad Wolf de chez ActuSF, je me décidais pour le quatrième tome de cette collection dirigée par l’auteure Audrey Alwett. Une couverture incroyable dans le plus pur style steampunk m’avait déjà décidé à prendre l’ouvrage, l’histoire lui rend tout à fait hommage (ou inversement, je ne sais plus).
Ce roman est, comme son titre l’indique, l’histoire entremêlée de deux sorcières qui sont associées.
Comprenez par là qu’elles ont monté une agence de détectives privées de l’étrange, non une énième alliance pour répandre le mal, conquérir le monde, faire tourner le lait ou que sais-je encore. Venant toutes les deux de pays en guerre, elles ont fui leur ancienne vie et par là, ce conflit et leurs antagonistes qui semblent pris dans une escalade de violence que rien ne peut entraver. Ces deux femmes que tout oppose se retrouvent donc dans la cité de Jarta, Cité-Etat neutre ou la seule loi qui existe est celle de l’argent. L’endroit idéal pour les criminels de tout poil, les pires d’entre eux étant les hommes d’affaires ultra-capitalistes qui n’hésitent pas à acheter les cadavres des ouvriers morts, pour en faire des zombies qui continueront à travailler dans les mêmes usines que de leur vivant. Rentabilité à tout prix. Un lieu idyllique vous dis-je. C’est dans ce cadre que Padmé et Tanit ont décidé d’associer leurs savoirs magiques et d’ouvrir une agence d’enquête sur les phénomènes paranormaux. Avouez, ça envoie du pâté.
Mais un beau jour, les problèmes viennent en frappant à leur porte. Plus gros que d’habitude, j’entends. Comme toute bonne enquête qui se respecte. Un vampire vient acheter les services de Padmé afin qu’elle découvre qui l’a envoûté et le force à obéir. Pour un être de son rang, se retrouver forcé à servir des humains est source de disgrâce, d’embarras et de bon nombre de plaisanteries de la part de ses pairs. Le bon côté est qu’on lui demande de faire ce en quoi il excelle, à savoir chasser et tuer des humains. C’est le début de l’enquête de Padmé car bien évidement ces assassinats par intermédiaire ne sont pas sans raisons. Reste à savoir quel enjeu poursuit le commanditaire. De son côté, Tanit est embauchée par l’un de ces riches industriels dont je vous parlais plus haut. Cet important homme d’affaire a quelques soucis dans son usine et craint une malédiction. C’est bien de s’en préoccuper une fois que la quasi-totalité de la main d’œuvre est morte-vivante. Mais il ne veut rien entendre et attend une solution à son problème. Bref, de l’argent facile pour Tanit.
Alex Evans revisite ici, en quelques trois cents pages, le mythe steampunk déjà écrit tant et plus. Les appareillages cuivrés ou à vapeur ne sont qu’un décor permettant la mise en scène d’une enquête fantastique dont Sir Conan Doyle aurait à craindre la comparaison. Les éléments d’enquêtes s’ajustent sur un point d’orgue qui prend le lecteur bien au dépourvu. Les personnages sont créés en profondeur et semblent tout à fait crédibles et ça change. Il y a tellement de sorties littéraires de ce genre, nouvelles ou déjà classiques, dont les personnages sont trop convenus et agissent ou réagissent tel un deus ex machina théâtral. Alex Evans nous fait le plaisir de faire des êtres d’encre et de papier qu’on jurerait avoir côtoyé autour d’un verre ou au détour d’une rue. La magie en bonus.
Pierre-Marie Soncarrieu