C’est toujours intéressant d’aller déambuler dans les rayons d’une bibliothèque. Mis à part le fait que l’on puisse croiser tout ce que l’univers est capable d’engendrer en terme anthropologique c’est surtout parce que tous les rayonnages sont remplis d’ouvrages écrits, de livres si vous préférez. Il faut parfois savoir s’aventurer hors des sentiers battus et l’on peut tomber sur certaines petites pépites. Non elles ne sont pas en or je parle toujours de livres ! Cette fois-ci je suis tombé sur l’un d’entre eux traitant d’un genre assez surprenant : le steampunk. Terme étrange sous lequel se cache une divergence de l’histoire ou l’écrivain met en scène un passé alternatif avec tout un tas d’inventions bizarres à coup sûr, loufoques souvent et inquiétantes parfois. Cela vous intéresse ? De toute façon vous n’avez pas le choix alors suivez-moi.
Londres, 1861. Cette ville est alors la capitale du monde, la moitié de la flotte commerciale mondiale bat pavillon britannique, sa puissance financière est gigantesque, le monde lui est soumis. Sir Richard Francis Burton est un
explorateur, il a mené d’importantes expéditions en Afrique et sa réputation d’homme courageux n’est plus à faire. Algernon Swinburne est un poète, talentueux et doué mais adepte de certaines pratiques lui donnant une réputation assez sulfureuse. Ces deux personnages que tout oppose vont se rencontrer et être mêlés à une étrange affaire : retrouver une bête étrange capable de faire des bonds formidables et ayant la fâcheuse tendance à s’en prendre à de jeunes filles : Spring Heeled Jack.
Ce dernier apparait comme par magie, malmène ses victimes et disparait dans de gigantesques sauts tout en laissant derrière lui le souvenir terrible de son ricanement. Voilà un défi à la hauteur de nos héros. Ces derniers sont aidés dans leur tâche par la police et le gouvernement et par les multiples inventions de leur époque où l’on croyait que la science ne pouvait connaitre aucune limite. Ils usent ainsi de chaises-hélicoptères, de chevaux génétiquement modifiées faisant près de 3m au garrot et capable de transporter des charges énormes, etc. Le charbon et l’électricité sont partout, apportant mille et une colorations à cet univers de progrès et où, pourtant, la misère demeure le lot d’une grande partie de la population, nous sommes toujours au XIXème faudrait pas exagérer non plus. Des machines farfelues et totalement anachroniques d’accord, une guilde des Technologistes d’accord mais un monde où tout le genre humain vit agréablement ca viendrait pousser le bouchon un peu trop loin. Petite mention spéciale d’ailleurs pour cette fameuse Guilde divisée en deux branches rivales. D’un côté les Ingénieurs qui nous mettent au point des machines plus tordues les unes que les autres et de l’autre les Eugénistes capables de créer des perroquets parlants et des cygnes géants pour les voyages au long cours.
Le sujet de ce livre est intéressant à plus d’un titre. En effet nos deux héros ont réellement existé et ils vont croiser plus d’un personnage historique dans leur aventure, cela ajoute une dose de réalité à l’ouvrage de Mark Hodder. De plus Spring Heeled Jack est une véritable affaire de l’Angleterre victorienne. Sa première apparition remonte à 1837 et les dernières se feront à la charnière du XIXème et du XXème siècle. Hodder brode donc son canevas sur un personnage entré dans le folklore et parvient à lui donner la consistance nécessaire pour en faire le thème central de son œuvre. Mais qui est donc cet être curieux ? Est-ce un démon ? Un homme ? Les deux ? Pour le savoir il vous faudra lire l’ouvrage. La fin étant assez rocambolesque pour nous surprendre et néanmoins logique car elle permet à
l’œuvre entière de retomber sur ses pieds car comme tout le monde le sait : magie et science ne font pas bon ménage.
On pourrait reprocher à l’œuvre certaines longueurs, la construction du récit y étant pour beaucoup à mon avis. La première partie suit le point de vue de nos héros et commence sur les chapeaux de roues. La lecture est haletante, la découverte de l’univers palpitante, la collecte d’indices prenante. La seconde partie est plus calme, plus posée. Apres le sprint du début certains pourraient trouver le changement de rythme plutôt déroutant. Mais une fois plongé dans le récit et les différentes énigmes trouvant leurs explications au fur et à mesure, on ressort de cette deuxième partie assez satisfait. Voilà mon conseil de lecture pour le mois de mars. A vous de le suivre ou non. Et puis je vais vous dire : du moment que vous lisez tout va bien !
MARTIN NUVILLE